Nul ne sait ce que Jérôme Aubineau s’est imaginé dans le ventre de sa maman. Impatient de voir le monde, il est sorti un peu prématurément. De la première gifle donnée par le médecin accoucheur, il a fait son premier applaudissement, sa première claque. Depuis, à la première occasion, à la première gifle du réel, Jérôme prend la tangente. Il file en douce, esquive la réalité. On ne sait plus d’ailleurs s’il crée la fiction dans le réel ou s’il fait du réel la plus étourdissante fiction. Des études de droit et de sociologie constituent une belle base de données qui ne demande qu’à être triturée. Jérôme aime observer, écouter, partir du quotidien pour aller vers l’imaginaire.
Il jongle avec les mots sur le fil dérisoire, avec son corps aussi, et on entre dans une vraie danse de calembours et d’orgues de barbarismes ; il lance les oxymores et les syllabes en l’air. Tout est majuscule, rien n’est capital, bref au menu un grand bol de rire et un nuage de légèreté.
Pilier de baratin, Jérôme Aubineau a une force rare quand il raconte, parvenant à construire une relation complice avec le public, une relation simple, évidente et généreuse. Un sens du rythme, de la rupture, une énergie et une présence qui donne l’impression que ce conteur vole. Chez lui, la musique comme les histoires est un phénomène physique, un tremblement de nerfs.
Ses souliers rouges ont la bougeotte, ils ne restent jamais en place. Il a les pieds sur terre mais ne rêve que de s’envoler et d’embarquer (avec tendresse) les gens avec lui, les faire danser sur un nuage.